
Les ateliers de joaillerie, d’horlogerie, de maroquinerie et plus largement tous les métiers d’art de précision exigent des gestes extrêmes – postures penchées, mouvements très fins, travail prolongé des mains au niveau des yeux, etc. Cette configuration engendre de fortes contraintes biomécaniques (gestes répétitifs, appuis prolongés, efforts intenses des doigts) qui exposent les artisans aux troubles musculo-squelettiques (TMS). Ces pathologies (douleurs lombaires, cervicales, tendinites du poignet ou de l’épaule, etc.) constituent déjà la première cause de maladies professionnelles en France (inrs.frequipedia.ifce.fr).
Aujourd’hui, environ 87 % des maladies professionnelles sont liées aux TMS (equipedia.ifce.frameli.fr). Leur impact se répercute sur la performance de l’atelier : l’Assurance Maladie estime que 30 % des arrêts de travail sont dus à un TMS, représentant chaque année près de 26 millions de journées perdues (environ 2,4 milliards d’euros de charges sociales) (ameli.fr). Dans les petites industries artisanales, ces absences répétées et la dégradation de la santé des ouvriers affectent lourdement la production et la qualité du travail.
Risques biomécaniques dans les métiers de précision
Les postes de travail des métiers de précision cumulent de nombreux facteurs de risque. On observe notamment :
- Mouvements répétitifs des doigts et poignets (coupe de métal, sertissage, couture du cuir, manipulation de vis et ressorts) qui sollicitent intensément les articulations.
- Postures statiques ou penchées : dos incurvé, tête en avant, bras élevés ou avancés à hauteur du regard pour travailler la minutie, pouvant provoquer lombalgies et cervicalgies.
- Contraintes visuelles : vision de très près sur des détails minuscules ; un éclairage insuffisant ou mal orienté pousse le corps à se pencher.
- Outils vibrants ou résistants : polisseuses, perceuses, limes ou machines à coudre manuelles imposent effort et micro-vibrations.
- Espace de travail restreint : établi encombré limitant la mobilité du tronc et concentrant les efforts sur de petits groupes musculaires.
Ces situations sont comparables à celles observées chez les tatoueurs ou dentistes : l’INRS rapporte « une forte prévalence de TMS » au cou, au dos et aux membres supérieurs pour ces professions.
Chiffres clés : arrêts de travail et TMS
- 87 % (voire 93 % dans certains bilans) des maladies professionnelles sont des TMS.
- 30 % des arrêts de travail sont causés par un TMS.
- 26 millions de journées de travail perdues par an (soit ~2,4 milliards d’euros) sont imputables aux TMS.
- Dans la sellerie-maroquinerie de luxe, par exemple, 86 % des maladies professionnelles reconnues en 2018 étaient des TMS.
- 46 % des TMS entraînent des séquelles permanentes (incapacité) chez les victimes.
Ces chiffres soulignent l’urgence d’agir en amont dans les ateliers de précision : l’absence prolongée d’un artisan qualifié se répercute sur toute l’équipe.
Analyse par métier

Joaillerie / Bijouterie
L’opérateur est souvent penché sur le bijou ou l’outil (graveur, chalumeau, meule). Il effectue des gestes répétitifs et fins (soudure, sertissage, polissage) dans un environnement parfois bruyant (polisseuse) ou chaud. Comme le rappelle un médecin du travail, les risques incluent « postures contraignantes, gestes répétitifs, contraintes visuelles, bruit, chaleur, [et] produits chimiques ». Dans ce secteur, on observe fréquemment des tendinites du poignet et de l’épaule, ainsi que des lombalgies. Les microcoupures et brûlures dues aux outils complètent le tableau.
Maroquinerie / Sellerie
La découpe, l’assemblage et la couture de cuirs épais exigent souvent de maintenir les bras tendus ou fléchis latéralement, créant des tensions d’épaules et de poignets. Le travail se fait en position assise prolongée, générant des lombalgies. Ce secteur illustre bien la pénibilité : 86 % des maladies professionnelles y étaient des TMS en 2018. On y observe fréquemment des tendinites des épaules ou des poignets (usage intensif du cutter ou de la machine à coudre), ainsi que des lombalgies liées à la station assise.
Horlogerie
Les horlogers assemblent des mécanismes microscopiques. La brochure suisse SUVA insiste sur un poste parfaitement adapté (« adapter le poste de travail à la taille du salarié et à son activité »), avec un éclairage de qualité et des pauses régulières pour détendre le corps. Sans banc bien réglé (hauteur et inclinaison adaptés), l’horloger force la nuque et les épaules, ce qui se traduit souvent par des cervicalgies et des contractures, souvent accompagnées de fatigue oculaire.
Gravure / Métiers d’art
Le graveur ou ciseleur travaille de manière similaire au joaillier, avec de petits gestes répétés et un dos penché. Ce métier partage donc la même physiopathologie : des TMS du poignet, du cou et du dos (par ex. canal carpien, lombalgies) y sont fréquents, comme chez les autres artisans de précision.
Solutions ergonomiques concrètes
Pour préserver la santé des artisans et garantir la transmission des savoir-faire, plusieurs mesures simples et efficaces peuvent être mises en place.
- Réglage du poste de travail : Tabouret dynamique et établi à hauteur variable permettent d’adopter une posture droite, avec les bras soutenus sans effort. Cela limite les tensions dorsales et cervicales.
- Appui-bras ergonomique : Un support réglable soulage les épaules lors des tâches minutieuses. Il évite le maintien statique des bras en l’air, source de fatigue musculaire.
- Solutions Perdelle :
- Perdelle-Néo (fixé à l’établi) soutient efficacement les bras en réduisant les douleurs, testé avec succès en maroquinerie.
- Perdelle-Taya (fixé au siège) allie légèreté, mobilité et design discret, idéal dans les environnements ouverts au public. Tous deux permettent de réduire les TMS et de maintenir un geste stable.
- Perdelle-Swan (fixé au siège) version métal de Perdelle-Taya, il offre le même soutien articulé depuis le siège, avec robustesse et grande fluidité, idéal pour les environnements techniques ou industriels..
- Éclairage adapté : Une lampe articulée bien positionnée évite les postures contraignantes et la fatigue visuelle. Il faut éviter les reflets parasites.
- Pauses actives & alternance des tâches : Intégrer des étirements courts et varier les activités permet aux muscles sollicités de récupérer, réduisant ainsi les risques de TMS.
- Cadre de travail sain : Lumière d’ambiance, température agréable et formation aux bons gestes renforcent durablement l’effet des ajustements techniques.
Ces aménagements sont généralement peu coûteux. Par exemple, un support modulable pour bras ou une lampe d’atelier ajustable se rentabilisent rapidement grâce aux gains en santé et en productivité. L’ergonomie bien pensée accroît le confort et l’efficacité : selon la SUVA, un poste de travail ergonomique augmente la productivité des opérateurs.

Prévenir pour préserver les savoir-faire
Privilégier la prévention, c’est protéger le capital humain de l’entreprise. Cela évite que des artisans expérimentés abandonnent leur activité en raison d’une incapacité. L’Assurance Maladie note par exemple que 46 % des TMS laissent des séquelles permanentes, entraînant parfois un reclassement ou une inaptitude professionnelle. Les PME artisanales ont tout intérêt à rendre leurs métiers soutenables : investir dans l’ergonomie (éclairage optimal, sièges adaptés, supports ergonomiques, pauses actives…) est plus rentable à long terme que de gérer les arrêts maladies.
Prévenir est préférable à guérir. En agissant dès maintenant sur l’aménagement des postes de travail, les dirigeants garantissent la santé de leurs ouvriers et la transmission des compétences pointues de leur atelier. L’ergonomie devient ainsi un véritable levier stratégique pour assurer la pérennité des métiers d’art.